L'essentiel Citerr

Projet scientifique.

Les cadres de l'interprétation

Le projet scientifique de Citerr formalise et explicite les fondements et orientations qui guident l'ensemble des actions engagées dans le cadre de son activité et de la poursuite de ses objectifs.
Il décrit :

  • Le choix du territoire géographique ;
  • Les recherches engagées ;
  • Les champs scientifiques référencés ;
  • L'inscription dans le champ artistique ;
  • Les méthodologies utilisées ;
  • Les modalités de leur mise en œuvre ;
  • Les compétences et moyens mobilisés ;
  • Les partenariats contractés ;
  • Les formes de leur valorisation.

L'objectif de Citerr est double :

  • Construire et partager de nouveaux regards sur les territoires, par le biais de projets artistiques de recherche, centrés sur des questions d'habitat et de climats, de communs et de vie collective, de résilience et d'éco-milieux.
  • Développer en territoire des Fabriques artistiques d'innovation locale interdisciplinaires pour faire face aux répercussions du dérèglement climatique et de l'extinction de la biodiversité sur les milieux de vie et inventer les terroirs habitables de demain.

Cet objectif est énoncé dans son manifeste, Inventer ensemble les terroirs habitables de demain.

Citerr affirme la place de l'artiste comme un interprète du sensible et un inventeur de formes indispensable dans la production d'un monde commun.

Le choix du territoire se fait en plusieurs étapes.

Il y a l’attraction produite par les premières impressions sociales et/ou paysagères. Elle peut être autant intellectuelle, sensorielle qu’affective, c’est l’accroche de départ.

L’élément catalyseur de la rencontre vient ensuite, souvent de manière fortuite.
Il peut s’agir d’un fait historique, d’une tradition populaire, de savoir-faire spécifiques, d’une formation géophysique, de biotopes particuliers ou encore d’une fiction littéraire… Il fera office de chas d’aiguille pour les premières recherches.

Celles-ci vont privilégier une approche géohistorique et biorégionaliste qui va produire une vision d’ensemble des interdépendances à l'œuvre sur le territoire choisi. Elles établiront les coordonnées des différents projets de recherches et terrains d’enquête qui seront menés ensuite.

Les Landes de Gascogne et les Hautes-Pyrénées sont au nombre des territoires de recherche actuellement choisis par Citerr.

Les recherches conduites par Citerr portent sur les cadres conceptuels et techniques de l'interprétation des milieux de vie humains et autres qu'humains, les formes de leur médiation et leurs conséquences en terme d'action publique environnementale.

Elles partent d’hypothèses construites à partir du territoire choisi et croisent connaissances scientifiques, savoirs élaborés et savoirs artistes.

Les hypothèses retenues sont formulées à partir des observations, descriptions et documentations effectuées lors des prospections et repérages géographiques ou à partir d'intuitions. Elles sont mises en regard de l'état de l’art des publications scientifiques traitant de sujets voisins ou apparentés et sont accompagnées d’une veille thématique en lien avec leur objet.

Elles sont formalisées au sein de deux ensembles :

Le projet ÉLISÉE part de deux éléments — la défiance du géographe français Élisée Reclus à l’égard des cartes topographiques dans la compréhension de la géographie et les recours actuels aux paléoenvironnements pour prédire les modifications des écozones et des habitats humains face aux changement climatique — pour problématiser les effets de seuil des systèmes de représentation visuelle confrontés à des réalités impensées ou qu'ils contribuent à invisibiliser.

Les Sentipensées s’appuient sur les méthodes du sociologue colombien Orlando Fals Borda, inventeur de la « recherche-action » et les recherches actuelles sur le buen vivir pour établir les liens existants entre la biogéochimie des écosystèmes et les facteurs de bien être collectif.

Les recherches conduites par Citerr s'inscrivent dans un cadre interdisciplinaire approché depuis le champ artistique. Elles sont nourries par les sciences du vivant et du système Terre, la géographie, l’anthropologie, la sociologie, la philosophie, l'épistémologie, les sciences cognitives et la théorie des médias.

À titre d'exemples et sans volonté exhaustive, Buckminster Fuller, Peter Fend et Ocean Earth, The Center for Land Use Interpretation [CLUI], Andrea Branzi et Archizoom Associati, Ant Farm, Arakawa & Gins, Yona Friedman, Superstudio/Global Tools ou encore Design Earth ont été ou sont encore des sources d'inspirations.

Pour vérifier ses hypothèses de recherche et fonder ses interprétations du territoire, Citerr utilise en parallèle deux types de méthodologies :

  • des méthodologies orientées recherche ;
  • des méthodologies orientées projet.

Ces méthodologies dites méthodologies artistes ou méthodologies décousues permettent d’approcher un problème posé, une hypothèse ou une situation complexe à partir de critères inhabituels, fabulatoires ou plus simplement à partir d’éléments de contexte qui ont été ignorés ou de données qui n'ont pas été corrélées.

Elles s’appuient sur des méthologies rigoureuses d’enquête et de collecte de données, empruntées aux sciences humaines et aux sciences dures, tout en se réservant de les adapter ou de les réinventer selon les besoins, en partie ou en totalité ou de les mobiliser pour analyser et critiquer des méthodologies existantes. Elles sont empiriques et mutuellement compatibles.

L’affectation et la mise en œuvre de ces méthodes varient selon la finalité des projets et des types de recherches menées.

Certains projets incorporent un processus participatif qui suppose une « communauté de répondants », d’autres ont un protocole de conception et de réalisation qui fait intervenir des compétences multiples sur une durée plus ou moins longue. Dans les deux cas, les méthodologies sont affinées sur mesure tout en gardant suffisamment de plasticité et peuvent être complétées d’un conseil juridique lorsque nécessaire.

Prenons un exemple.
Les Mille et Un Lieux est un projet de recherche qui prend à la lettre l’expression « se sentir bien quelque part ». L’hypothèse posée est qu’il existe une corrélation entre des sensations de bien-être dans un biotope donné et la nature de ses sols et de son écosystème.
Demandez autour de vous, chacun vous répondra que c’est une évidence tout à fait quelconque et qui sait, partagera-t-il, partagera-t-elle des anecdotes personnelles. Pourtant rien ne l’établit scientifiquement.

Bien sûr, l’hypothèse doit être construite pour ne pas rester au stade de l'intuition. Dans cet cas précis, c’est une enquête qui amorce le processus : après les témoignages, les anecdotes, ce sont les « savoirs élaborés » qui s’invitent à la construction d’une expérience commune, d’une réalité partagée mais jusqu'alors inexprimée et sur laquelle on peut dorénavant s’accorder. Cela dessine une première géographie.
Comment ces savoirs élaborés vont-ils entrer en discussion avec les savoirs constitués du champ scientifique pour tenter de vérifier cette hypothèse, comment et sous quelle forme les résultats en seront-ils partagés, c’est une autre histoire. Une histoire de traduction dans laquelle l’art a son rôle à jouer.

La situation se pose différemment pour les projets n’ayant d’autre finalité qu’artistique. C’est le cas des Fabulations spéculatives où la méthode employée devra suivre sa logique interne sans y déroger et intégrer les accidents pour un résultat final difficilement imaginable à la conception.

Le propos de Citerr n’est donc pas de réduire la mise en œuvre de ses recherches à des formes uniques. Selon les propositions et les méthodologies élaborées, ce qui en découlera trouvera sa traduction dans une œuvre artistique mais peut-être aussi dans le développement d’indicateurs d’analyse d’un milieu de vie ou dans un projet de développement local co-construit avec une collectivité locale et ses habitants.
Au final, il pourrait y avoir ainsi plusieurs versions d’une même proposition, tel les facettes d’un même objet.

Les recherches menées par Citerr font appel à des compétences et des moyens extérieurs qui sont repérés et approchés en fonction des besoins identifiés des projets et en amont de leur mise en œuvre.
Leur mobilisation dépend des cadres et durées de réalisation des projets, des financements alloués, de la nature des collaborations souhaitées et des partenariats contractés. Elle intègre le bénévolat et la réciprocité de services.

La démarche de Citerr s'insère dans une dynamique territoriale culturelle ET environnementale. Les acteurs de ces secteurs sont les premiers approchés, au même titre que les collectivités locales auprès desquelles un projet peut trouver un accueil favorable. Ces prospections incluent les interlocuteurs institutionnels du territoire choisi (État/Région/Département). Les acteurs du milieu de la recherche, du monde économique et du monde associatif sont démarchés dès que les conditions de possibilité des projets sont suffisamment profilées.

Chaque territoire choisi fait l'objet d'une cartographie et d'un diagnostic préalable (démographie, économie, culture, éducation, infrastructures).

La médiation des recherches et de leur restitution publique est pensée dès la formalisation des projets et participe à la valorisation du territoire choisi :

  • Elle renouvèle le regard porté sur son patrimoine, humain comme écologique.
  • Elle sensibilise les publics jeunes et adultes à la protection et à l’entretien de leurs milieux de vie en proposant des regards et des expériences différentes de ce qui les compose.
  • Elle peut se révéler autant un outil innovant d’aide à la décision que de sensibilisation en matière environnementale.
Elle invente des médias de communication sur mesure en s'appuyant sur les infrastructures locales.